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De si longues Fiançailles
11 mars 2020

Lettre de Philippe à Denise, Nantes 02-06-1931

Lorsque je viens de laisser glisser ma lettre dans la boite, lorsqu’elle ne m’appartient plus, à ce moment-là seulement, je comprends combien je vous exprime mal ce que je pense –quand j’arrive à le faire- Vous devez trouver mes lettres particulièrement monotones malgré les fautes d’orthographe que je sème comme des coquelicots dans les blés et qui en rehaussent ( ??) la platitude. L’on a dit que les lettres doivent être le reflet de la pensée et je ne peux, dans les miennes, l’exprimer. Quand vous recevez de moi une lettre aussi stupide qu’a pu être la dernière, vous ne m’en voulez pas trop ?

Toutefois, je vous y demandais, je crois, de me donner du courage pour mon examen. Ne me croyez pas être complètement amorphe et sans ressources, seulement jusqu’alors, je ne m’étais jamais préoccupé du lendemain. J’avais confiance en ma bonne étoile et surtout en ma bonne couche de « je m’en foutisme » qui me permettait de tout encaisser. Mais maintenant, il y a vous qui ne devez pas « encaisser », alors,  je ne peux plus dire « vienne demain, on verra s’il fait jour ou s’il fait nuit, tant pis » et il faut que je m’arrange pour que demain il fasse jour. En travaillant –la comparaison est risquée et très connue- il me semble que vous êtes le but vers lequel tendent mes forces. L’examen qui approche est une des premières barrières à sauter. Alors, je me plonge dans le travail pour bien prendre mon élan et tel le coureur de 110 mètres-haies, ou bien Simone, quand elle fait du cross, je sue à grosses gouttes sur les problèmes de navigation, et surtout sur les maths pures qu’il me faut ingurgiter bon gré, mal gré. Toutefois, je préfèrerais traverser la Gironde à la nage…

Et puis aussi, j’ai tort de vous parler de tout cela, de mes soucis très puérils. 

dessin voilier Philippe enfant

Naviguer... un appel très lointain dans l'enfance de Philippe. Ci-dessus, un de ses premiers dessins

Maintenant je me reproche de n’avoir pas été assez attentif à chacun de vos gestes familiers, de n’avoir pas gravé dans ma mémoire chacun des froncement de vos sourcils ; chacun des reflets de vos cheveux, chaque éclat de vos yeux.

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