Lettre de Philippe à Denise, Le Havre, samedi 22 décembre 1934

Je n’ai pas pu te dire au-revoir mercredi soir comme je l’aurais voulu et puis il y a aussi des tas de choses que je ne t’ai pas dites. Surtout, je ne voudrais pas que tu croies que j’étais encore fâché, parce que je n’étais pas tout à fait comme d’habitude. T’en es-tu aperçue ?

Jeudi matin, à la Compagnie, on m’a dit que l’Arizona n’était pas encore arrivé et qu’il ne serait au Havre que le 28 décembre, pour repartir le 29. Comme on n’allait pas m’expédier à Anvers, où il se trouvait, j’ai embarqué sur « Louisiane[1] » qui est un autre cargo de la Compagnie et actuellement en réparations. Sans doute que j’embarquerai sur Arizona dès que celui-ci sera arrivé.

 Le cargo mixte « Louisiane », construit en 1905, pour la ligne des Antilles et du Mexique

En attendant, j’ai pris mon service à bord de Louisiane, il n’y a pas grand-chose à faire : quelques papiers à fournir des états de solde. Cet après-midi, je suis de garde à bord et demain toute la journée.

Comme les aménagements de Louisiane sont démolis, je loge à la Maison du Marin[2], boulevard Amiral Mouchez. Si tu veux m’écrire, tu peux le faire avant mon départ.

                               

Deux vues de la Maison du Marin, au Havre.

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[1] La fin du cargo Louisiane   propriété de la Compagnie Générale Transatlantique de 1921 à 1939: Le torpillage de trois bateaux français - Un, au moins, des sous-marins agresseurs a été coulé (Le Journal des débats, 18 octobre 1939)

« Nous avons annoncé, hier soir, que trois bâtiments de commerce français,  dont le paquebot Bretagne avaient été torpillés le 13 octobre 1939. On peut assurer qu'au moins l'un des sous-marins ennemis a été coulé. Touchant les passagers et l'équipage des bateaux torpillés, le commissariat à l'information communique les renseignements suivants :

-     Paquebot Bretagne, de la Compagnie générale transatlantique : 5 hommes d'équipage et 2 passagers de troisième classe sont portés manquants. Les rescapés sont arrivés à bon port.

-     Pétrolier Émile-Miguet, de la Compagnie auxiliaire de navigation : tout l'équipage a été recueilli.

-     Cargo Louisiane, de la Compagnie générale transatlantique : un seul tué, le second Capitaine. Les rescapés sont arrivés à bon port. »

[1] La Maison du marin a été créée par la Société des Œuvres de mer. Le bâtiment inauguré en 1931 accueillait, logeait les marins  de toutes nationalités en escale au Havre. Située dans le quartier de l'Eure, elle a cessé son activité dans les années 1970. Le bâtiment vient d'être transformé en appartements (renseignements fournis par Jean Bourienne, auteur d’ouvrages sur le Havre)