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De si longues Fiançailles
8 octobre 2020

Lettre de Denise à Philippe, Royan, ce 12 octobre 1935

Phil, je voudrais bien que tu sois auprès de moi ce soir. Je n’ai plus de courage, tu sais, j’ai trop envie de te voir. Quand reviendras-tu ?

Je pense que j’aurai une lettre de toi dans cinq ou six jours. Envoie-moi des photos, je t’en prie. Celle qui est dans ma lettre a été prise au port par Simone.

1935 Phare Denise       1935 Phare (1)

 

Phare de Royan Photo de Denise prise par Simone au port de plaisance

Je reste à Royan jusqu’à lundi prochain. Simone est déjà partie depuis huit jours pour préparer ses oraux, je suis donc ici toute seule. Ce n’est pas très drôle, d’autant plus qu’il pleut très souvent. Je vais sur la plage avec un livre, et je me baigne quand le temps le permet –aujourd’hui, par exemple.  Je viens de finir « Le Livre de San Michele » dont je t’ai déjà parlé, et aussi « Remorques » de Roger Vercel[1]. Ce n’est pas mal.

1935 10 09 Roger Vercel         Roger Vercel en 1934

 Tout Vercel dans la bibliothèque familiale                                                                             Portrait de Roger Vercel

Ta mère m’a prêté « Le Retour de l’enfant prodigue » de Gide, et deux livres de Malraux. Je ne sais pas si j’aurai le temps de lire tout ça avant mon départ. J’ai parcouru « La Voie Royale », ça m’a beaucoup déçue.

Ah ! tu sais, je suis très fâchée. J’ai entendu Mignot et Colette Harisburu[2] dire que tu avais engraissé énormément.

1912 08 18 Yacht Harispuru Fête Uruguay  1920 10 22 JO Edouard Nationalité uruguayenne infirmier-major

Le père de Colette Harispuru était d'une famille basque qui avait émigré en Uruguay avant de revenir en France. Il était producteur de cinéma

Ce n’est pas bien, je ne veux pas que tu engraisses. Tu passes tout ton temps à me dire de ne pas manger, et toi, tu n’y fais pas du tout attention. Quand je t’ai connu, il y a cinq ans, je suis bien sûre que je ne t’aurais pas aimé si tu avais été comme le gros Jean !

Indira est déjà rentrée à Paris. Elle s’est très bien amusée à Hendaye et a engraissé de six kilos –mais pour elle, c’est sans importance[3]. Elle a vu une course de taureaux et s’est évanouie d’horreur –ou à peu près.

Course de taureaux Indira a vu une course de taureaux et s’est évanouie d’horreur –ou à peu près.

Pierre Bouzin a emporté tes adresses, et depuis, je ne l’ai pas revu. Tout de même, il exagère. A-t-il écrit, au moins ? Tu ne sais pas, si tu étais resté au Havre huit jours de plus, tu aurais eu sa visite avec Véra. Dommage ! C’était une occasion unique de savoir si elle existait !

PS : Est-ce que Habana, c’est aussi beau qu’on le dit ? Reviens vite !



[1] L’un des auteurs favoris de la maison Dyvorne, Roger Vercel est le pseudonyme, puis le patronyme officiel (décret du 25 septembre 1936) de Roger Delphin Auguste Cretin, né en 1894 au Mans et mort en 1957 à Dinan, écrivain français.

[2] Colette, Anna, Louise  HARISPURU (1915-2009)  (on peut aussi rencontrer le patronyme HARISBURU, d’origine basque). Cette Colette Harispuru, fille d'Edouard et de Madeleine Salis, épousa en premières noces  (le 30 novembre 1936) Jean-Pierre FEYDEAU (1903-1970) puis en secondes noces Michel DROUIN (1912-2002), médecin-colonel, le grand copain de Philippe. Michel Drouin est décédé à Breuillet en Charente Maritime, à l’âge de 90 ans. Son premier mari, Jean-Pierre Feydeau est un réalisateur et scénariste français, fils du dramaturge Georges FEYDEAU (1862-1921) et de Marie-Anne CAROLUS-DURAN (1869-1936). Edouard Harispuru, administrateur de la C.C.F.C. (Compagnie Commerciale Française Cinématographique), fut producteur du film « L’amant de Bornéo », réalisé par Jean-Pierre Feydeau en 1942.Les frères Harispuru, Roger et Edouard, possédaient un yacht à vapeur ancré à Royan avant la première guerre mondiale.

[3] Indira, sujette à la dépression et à l’anorexie, est d’ordinaire trop maigre.

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