Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
De si longues Fiançailles
9 octobre 2020

Lettre de Denise à Philippe, Paris, ce 30 octobre 1935

Phil,

Je ne peux m’empêcher de t’écrire, bien que je sache que tu n’auras pas ma lettre avant dix jours. Mais, vois-tu, il me semble que ça te rapproche de moi.

Je pense que tu vas rester quelques jours au Havre. Tu sais, j’irai te voir. Plus d’un jour, si tu as le temps de rester un peu avec moi. Tu m’écriras dès ton arrivée pour me dire ce que tu comptes faire. Envoie-moi une lettre par Air Bleu, ça va aussi vite qu’un télégramme, c’est beaucoup plus commode et tu peux avoir ma réponse le soir même.

Je compte que tu seras en France à partir du 10. Ah ! si tu savais comme j’ai le cafard. Enfin, c’est ton avant dernier voyage, et l’année prochaine, je pourrai te voir plus souvent. Du moins, je l’espère.

Indu part jeudi le 7 (novembre) pour les Indes[1]. Et ça augmente ma peine. Parce quand elle sera partie, je n’aurai plus personne, plus une amie, rien. Je t’assure que ce n’est pas drôle. Par moment, j’ai l’impression que je deviens complètement tapée.

Vivan Sundaram  Vivan Sundaran, le fils d'Indira Sher-Gil

1985 08 Nouvelles de l'Inde       1985 08 page 1 (2)

 Premier article sur Amrita, août 1985

1986 01-03 Nouvelles de l'Inde (1)           1986 01-03 page 1a

 Second article sur Amrita, janvier-mars 1986

Simone s’est fait coller une fois de plus à ses oraux de droit et est obligée de recommencer tout l’année prochaine. Rosé est de nouveau « civil » -il a retrouvé du coup son allure étriquée- il fait de nombreux projets d’avenir. J’essaie de m’y intéresser, mais mon cœur est si loin.

Tu sais, ce garçon, Paul Victor[2], que nous connaissions, Indu, Amri et moi, et qui était parti pour le Pôle Nord ? Il est revenu avec le « Pourquoi Pas » et en ce moment, Paris-Soir publie ses souvenirs. Le Groenland y a l’air d’un pays enchanteur.

Paul-Emile Victor et la Pourquoi Pas en 1934 Le 25 août 1934, l'ethnologue et chef de mission Paul-Emile Victor, accompagné de l'anthropologue Robert Gessain, du géologue Michel Perez et du cinéaste Fred Matter-Steveniers, débarque du navire polaire Pourquoi-Pas ? dans le comptoir danois d'Ammassalik.

Je te quitte, Phil, il est très tard. Je me couche tous les matins à deux heures, ce qui achève de me détraquer. ‘Ne crois pas surtout que je sorte ou que je m’amuse, en ce moment, je vois beaucoup Indu, mais à part cela, c’est le vide absolu. Rien ne m’intéresse)

1935 10 30 Le Matin du 31  Paul-Emile Victor, Philippe... Denise est inspirée par les antipodes

 



[1] Denise ne reverra plus jamais les sœurs Sher-Gil :  la guerre, la mort d’Amrita en 1941, ont définitivement entravé leur amitié, encore entretenue par une correspondance qui se poursuivra jusqu’en 1939. Bien des années après, vers 1985, Le fils d’Indira,  Vivan Sundaram, né en 1943, metteur en scène indien, est venu voir Denise à Cergy-Pontoise, où elle passa sa retraite, et lui demanda d’écrire ses souvenirs dans Les Nouvelles de l’Inde. Indira (1914-1975) était déjà décédée à cette époque.

[2] Après sa première expédition au Groenland, Paul-Emile Victor (1907-1995) retourne en 1935 en France. Fort de son aura et de son sens de la communication exceptionnels, il acquiert une notoriété médiatique grâce à de nombreuses conférences et articles sur ses aventures, dans des revues diverses.

Publicité
Publicité
Commentaires
De si longues Fiançailles
Publicité
Archives
Publicité