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De si longues Fiançailles
19 février 2021

Lettre de Philippe à Denise, à bord, dimanche 10 janvier 1937

Nous sommes arrivés plus tôt que je ne pensais à Cardiff : dans la nuit de vendredi à samedi, mais après avoir fait du charbon pour la machine samedi matin, nous sommes allés au milieu d’un bassin, l’avant et l’arrière amarrés à des bouées et nous sommes restés là hier après-midi , aujourd’hui, et n’en partirons que demain à midi, si le bateau que nous devons remplacer est fini de charger. Nous vivons donc là, comme en pleine mer. Aller à terre semble trop loin : 100 mètres !

Cardiff

 Hier, j’ai mis de l’ordre dans ma  cabine, j’ai rêvé et j’ai lu. J’ai fini mon livre sur la théorie darwinienne, et au fond, je trouve cela assez intéressant.

Ce matin, j’ai terminé le rouleau de photos en prenant le Guist’hau. Je ferai développer à Calais et te renverrai ton appareil de là-bas.

1937 01 10 Gabriel Guist'hau proue 2     1937 Philippe (2)

 Le Gabriel Guist'Hau à la proue                                                                            Philippe en 1937

Cet après-midi, je me suis transformé en charpentier-menuisier, un métier que je n’avais jamais encore pratiqué.

Dès mon arrivée, on m’a remis une lettre de ma mère qui devait m’attendre depuis plusieurs jours. Elle t’y couvrait d’éloges pour la façon dont tu as fait ses commissions. Il y avait en plus dans la lettre une carte d’Yvonne Bonnot et de son mari, qui disait : « Nous formons pour ton bonheur des vœux affectueux et je te prie de les transmettre aussi à Denise, dont j’ignore le patronyme, c’est pourquoi j’emploie le prénom. J’espère à bientôt, car à ton retour, tu passeras bien par Paris et dans ce cas, nous comptons sur vous deux. ». Ce qui m’a fait plaisir dans cette carte, c’est que nous ne sommes pas considérés séparément.

Je viens de rester un long moment à rêver –il est tard et tout est calme à bord-

Lundi soir, nous sommes toujours au milieu du bassin à ne rien faire, mais il est question d’aller charger demain matin. Aujourd’hui, j’ai fait de la peinture ! J’ai refait les marques de charge du bateau, travail délicat et soigné ! c'est-à-dire que j’ai passé la journée pendu au bout d’une corde le long de la coque.

J’ai eu des tas de lettres : d’abord, dès le matin, ta lettre par avion, qui a été apportée à bord par un canot. Puis à 11h, ta première lettre, une carte de ta mère, une lettre de la mienne qui contenait une lettre de la Cie Gle Transatlantique qui m’offre une place d’élève-officier pour le 25 janvier.

1937 Pub Cie Gale Transat Publicité pour la C.G.T. en 1937

Mais, même si je pouvais me libérer du Guist’hau, je n’accepterai pas ; à la Transat, je n’aurai que 500 ou 700 francs par mois. Je leur ai répondu de ne pas compter sur moi. Je préfère vivre dans le charbon et passer ensuite 15 jours avec toi.

Nous serons à Calais vendredi soir.

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