Lettre de Philippe à Denise, Condorcet lundi 27 septembre 1937

Le cafard se dissipe au fur et à mesure que les jours passent ; maintenant, je ne vois plus que l’instant du départ et te revoir. Je ne sors plus mais cela ne fait rien et d’être resté presqu’un mois sans sortir lorsque je quitterai le bord ne me fera rien regretter.

J’ai pensé que si nous allions directement dans l’île (d’Oléron), je te retrouverai à Saintes et nous finirions le voyage ensemble. Je n’ai pas de lettre de ma mère, mais je pense en recevoir une vers jeudi ou vendredi. Je t’écrirai alors aussitôt et nous arrangerons nos départs.

Lucien doit m’avoir rattrapé au point de vue poids ! Tu pourras lui écrire cela. Je ne me suis pas pesé depuis longtemps mais je dois être à peu près vers 68 kg ! Evidemment, je ne suis pas le seul dans cet état, mais je suis un de ceux qui ont le plus perdu. Je ne m’en plains pas trop d’ailleurs.

Je pense bien aussi que notre mariage aura lieu à Brest –où j’aurai certainement une chambre cet hiver, bien que je ne sache pas si c’est absolument nécessaire étant donné que mon domicile est un navire de guerre attaché à Brest. Enfin je verrai cela là-bas et me renseignerai à la mairie. Et puis dans quelques jours, nous en parlerons et déciderons tous les deux des moindres détails.

C’est très gentil de la part de ton oncle (Maurice Proutaux) de m’avoir invité à « monter » chez lui –mais… je ne sais pas encore comment se terminera ma permission. J’ai droit à 18 jours plus quatre jours pour l’Expo mais j’aurai une date déterminée pour me présenter à bord du cuirassé amiral à Brest, de sorte qu’il faudrait que nous quittions l’île 4 jours avant cette date pour aller à Paris quels que soient les jours de permission écoulés et alors, en arrivant à Brest, il me sera fait un décompte de ces 4 jours dans ma permission, et, s’il y a lieu, ils me resteront à prendre avant la fin de l’année, c'est-à-dire pour Noël.

      

Visiter l'Expo puis se présenter au cuirassé amiral à Brest

Tout cela représente un avenir un peu éloigné. Pour moi ne compte que l’instant où je te retrouverai et te tiendrai dans mes bras !