Lettre de Philippe à Denise, à bord, 20 janvier 1940
Transport pétrolier « Le Niger »
Ma petite fille chérie
Chaque jour me rapproche de toi et chaque heure me semble plus longue que la précédente. J’ai eu des nouvelles de toi par ta lettre du 12 janvier –tu n’avais pas reçu mes dernières lettres, ni mon deuxième mandat- Je viens de compter à peu près ce que je t’ai envoyé et ce que tu as du toucher. Depuis septembre, c'est-à-dire pour octobre-novembre-décembre-janvier, cela doit faire 7.300 francs. Pourvu que tu aies assez pour venir me rejoindre ! Je sais par Rivoallan[1] que je viens de rencontrer, que tu as eu beaucoup de courage –ma petite fille- moi qui voudrais pour toi une vie facile. Je crois que je n’y réussis pas très bien en ce moment.
Dès notre arrivée, je te préviendrai par dépêche et je t’attendrai avec impatience. Réponds-moi aussitôt pour me dire l’heure d’arrivée.
Pour l’appartement, fais ce que tu voudras. Tu es, plus que moi, bien placée pour juger, et je comprends que si nous le quittons, tu ne pourrais avoir la certitude d’en retrouver un qui nous convienne aussi bien. Et puis, lorsqu’il faudra que je reparte, si ce doit être dans les mêmes conditions, tu sauras que tu as quelque part un endroit qui te plaît et où tu peux vivre à ta guise.
J’ai vu Jeanne[2] dont le mari est mobilisé sur place. C’est une façon de parler car il est absent pour 15 jours. Elle m’a dit t’avoir écrit ces temps derniers.
Petite fille chérie, encore quelques jours –huit environ- et je pense que nous serons réunis ou bien près de l’être. Phil