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De si longues Fiançailles
2 mars 2021

Lettre de Philippe à Denise, Port Talbot, mercredi 3 février 1937

Les voyages –qui forment ma jeunesse[1]- se suivent toujours pareils- arrivées dans les ports après une traversée plus ou moins pénible, poussière de charbon un peu partout, une course à terre pour les papiers de bord et un passage au « prix unique » du pays puis départ.

charbon une poignée de charbon gallois destiné à la France

Cette fois-ci, ce sera encore la même chose mais il est possible qu’en arrivant au Havre, nous restions sur rade un jour ou deux avant de monter à Rouen parce que nous n’aurons peut-être pas assez d’eau. Dans ce cas-là, je pourrais peut-être essayer d’aller à Paris, soit à ce moment-là, soit pendant le séjour à Rouen qui comprendrait un dimanche. Comme je ne puis te prévenir du jour où je viendrai… car nos séjours à Rouen sont limités et je serais obligé de bondir dans le train aussitôt arrivé. Au fond, je t’enverrai un télégramme en prenant le train.

J’ai touché mon argent et je te le donnerai à Paris ou si je ne peux pas y aller, je t’enverrai un mandat de 700 francs et le mois prochain un de 800. Je ne sais pas quand je débarquerai, j’attends pour le fixer la réponse de la Marine au sujet de mon départ au service.

Je reprends ma lettre à 7h00 du soir, j’ai été interrompu ce matin et puis je voulais pour la terminer être fixé sur notre départ. Le chargement est fini et nous partirons vers 9h. Je donnerai ma lettre au pilote et je pense que tu l’auras vendredi matin… à l’heure où nous arriverons –s’il n’y a pas de mauvais temps- sur rade du Havre- je ne pourrai pas débarquer à ce moment-là, mais comme nous ne devons remonter qu’à la marée de dimanche matin, je serai probablement dimanche après-midi vers 6h du soir à Paris. J’y resterai sans doute jusqu’au lundi après-midi.

Je viens de relire « Passage de la ligne » (Edouard Peisson) et il me semble mieux que la première fois.

1937 02 03 Edouard Peisson Passage de la ligne 1935

Je mène d’ailleurs une vie en circuit fermé et ma seule évasion de bord est de penser à toi et à notre futur voyage en Alsace. Ne te désole pas s’il n’y a pas encore de neige et surtout n’achète rien encore qui soit particulièrement destiné aux sports d’hiver. De toutes façons, je passerai certainement une journée à Paris en débarquant –nous irons sans doute chez les Bonnot- et je suis certain que ce sera largement assez pour faire les achats.

Ecris-moi à Rouen dès que tu auras cette lettre, parce que je trouverai la tienne en arrivant.



[1] « Les voyages forment la jeunesse » : ce proverbe est souvent attribué, à tort, à Montaigne. Il recommande simplement pour les enfants la visite des pays étrangers (dans les Essais). Le proverbe n’est réellement apparu sous sa forme actuelle dans le Dictionnaire de l’Académie en 1835.

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