Lettre de Philippe à Denise, Brest, mardi 30 novembre 1937

Je suis dans une chambre d’hôtel –j’avais trop envie d’être seul pour penser à toi et rester à bord me semblait trop dur.

 Un hôtel brestois d'avant-guerre

Hier soir, je n’ai pas pu faire partir ma lettre à temps –j’aurais voulu qu’elle t’arrive ce soir. J’espère que tu la recevras demain matin. Je ne sais plus ce que j’ai écrit –certainement, je n’ai pas su te dire toute ma peine- y arriverai-je un jour ? C’est tellement difficile de te donner du courage lorsque je ne suis pas près de toi.

Demain matin, nous partons à 9h00. Je ne serai pas à bord mais près de toi –ce qui se fera ne m’intéresse pas puisque tu seras triste. Si tu savais combien je voudrais pouvoir écarter de toi toutes les blessures que l’on te fait –sans le savoir. Tu seras bientôt ma femme et j’éloignerai de toi toute amertume. Je saurai te faire une vie heureuse et belle. Tu n’as pas à connaître les petites mesquineries de tout le monde, mais lorsque tu rencontres des choses qui t’irritent, qui te blessent, il faut penser que chacun ne voit pas la vie de la même façon.

Tout ce que je viens de t’écrire est pauvre devant ta peine –je ne sais pas te dire la pitié tendre qu’il faut accorder à tous et ne garder l’amour que pour une seule personne.

P.S. : Continue à m’écrire à Brest-Arsenal. Les lettres nous suivront jusqu’au 6 décembre.

 Valeur estimée de ce cachet en 2014: 225€