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De si longues Fiançailles
23 août 2021

Lettre de Philippe à Denise, Brest le jeudi 21 avril 1938

J’ai reçu ta lettre ce matin. Je commençais à être triste de ne rien recevoir et les jours me paraissent si longs lorsque, le matin, je n’ai pas vu ton écriture parmi les autres lettres.

Je pensais que nous aurions des nouvelles de nos affectations et de notre nomination aujourd’hui mais il n’y a encore rien ; j’espère pourtant que cette semaine ne finira pas sans changements. Je n’ai pas touché d’argent depuis mon arrivée mais sans doute en toucherai-je demain un peu –nous remettons nos sacs aujourd’hui- que je t’enverrai.

Les jours passent sans marquer beaucoup : avant-hier, je suis parti avec une embarcation à l’aviron et tout un tas de matelots pour faire des observations sur la portée du son des  sifflets de la « Lorraine »[1] !

Sifflet à vapeur

Hier après-midi à 5h, je suis allé à terre me faire couper les cheveux –pas trop courts- et pour revenir, j’ai pris une embarcation à 6h1/2. Je te parle de cela parce que j’ai eu l’impression que j’avais perdu l’habitude de remarquer les choses belles qui me sont offertes par mon métier. Je t’ai dit que l’endroit où nous débarquons en allant à terre est à l’embouchure d’une rivière : la Penfeld[2], qui traverse Brest et que les rives sont très encaissée. J’avais en face de moi deux torpilleurs amarrés au pied d’un fort qui domine l’entrée de la Penfeld ; il faisait très beau et très calme et brutalement, je me suis aperçu du caractère de ce spectacle que je vois presque tous les jours depuis six mois.

1938 04 21 château de Brest à l'entrée de la Penfeld

Le château de Brest à l'entrée de la Penfeld

Hier soir, je me suis endormi avec un mouchoir que j’avais parfumé au moment de quitter notre chambre au Texan Hotel –cette nuit, j’ai rêvé de toi et quand je suis réveillé, je pense tout le temps à toi-

Texan Hotel hypothèse

Moi aussi, je regarde souvent mon alliance mais je ne désespère pas trop, je suis triste de n’être pas près de toi mais bientôt, je te tiendrai dans mes bras. Aie encore un peu de courage, la vie nous sera bonne, nous le désirons trop pour qu’il en soit autrement.



[1] Le sifflet fait partie du matériel de signalisation sonore d’un navire. Obligatoire pour les navires de plus de 12 m, il ne s’agit pas d’un instrument de bouche, mais d’un appareil fixe devant répondre à des critères de niveau sonore, de portée et de fréquence qui sont réglementés. Le vrai sifflet, comme l’instrument de musique, contient un biseau généralement mis en vibration par de la vapeur sous pression. Cependant, dans la réglementation, le terme est générique et désigne également une sirène ou un appareil équivalent.

Ses caractéristiques et ses cas d’emplois sont précisés dans le Règlement international pour prévenir les abordages en mer.

[2] La Penfeld  est un fleuve côtier français, long de 16 km, sur la rive gauche duquel s'est développée la ville de Brest, dans le Finistère. Sur ses derniers kilomètres, aux rives escarpées (versants abrupts de 25 à 30 m de haut), la Penfeld est incluse dans la base navale de Brest (Marine nationale), ancien arsenal de Brest, zone sous contrôle militaire vouée à la construction, à la réparation navale et au soutien de l'escadre de l'Atlantique. À son embouchure, sur un site dont la valeur militaire est reconnue depuis l'Antiquité et au-delà, a été construit un château fort, le château de Brest, construit pour l'essentiel au XVe siècle et où est implantée désormais la préfecture maritime de l'Atlantique ainsi que le musée de la Marine de Brest.

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